Marie-Thérèse Adam, oblate de Notre Dame de Jouarre, France, était déléguée lors du  1er Congres des Oblats à Rome. Comme Ruth la Moabite elle a glané pour nos lecteurs quelques ‘épis’ qui l’ont enrichie et la feront vivre jusqu'au prochain congrès où d'autres partageront ce qu'ils auront vécu.

Lectio divina : Trois femmes agissent, la communion peut sauver, cf. Exode 2, 1-10. La mère de Moïse a le courage de défier l'ordre du Pharaon en courant un péril personnel ; elle m'invite à garder un regard clair qui ne se décourage pas devant les difficultés et à garder l'espérance. La fille de Pharaon a un cœur capable de pitié qui peut dépasser les différences de race, de religion, de rang ; elle m'invite à accueillir l’événement imprévu et à découvrir l'autre dans sa beauté. La sœur de l’enfant, créature fragile mais vigilante, regarde la mère confier son frère aux flots ; elle le suit du regard jusqu'au moment où la fille de Pharaon le voit et le recueille. Elle a la capacité de mettre les personnes en relation au moment opportun. Ces trois femmes sont complices dans la désobéissance pour avoir été fidèles à l’appel de la vie qui vient à elles. Elles nous montrent que la communion est possible même au-delà des frontières religieuses. A nous de concrétiser chaque jour cette possibilité de communion.

La création : revenons aux premières pages de la Bible. « Dieu bénit l'homme et la femme : ‘Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la ; dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux qui rampent sur la terre’. »[1] D’après certains, l’une des causes de la crise écologique du monde actuel serait le concept biblique décrivant les êtres humains comme régisseurs de l'univers, leur conférant le pouvoir de dominer la terre, voire de la détruire, au lieu d'entretenir avec elle un rapport animé par l’amour. Nous sommes invités à être pour la terre ce que Dieu est pour nous, représentants du Dieu qui est amour pour l’univers. Nous devons appliquer à la création, aux êtres vivants, à l’eau et au sol, ce que nous lisons dans la Règle : « Tous les objets du monastère et tous ses biens, il  [le cellerier] les regarde comme les vases sacrés de l'autel »[2]. Il est bon de voir toute la création comme l'ensemble des éléments du monastère cosmique de Dieu. Nous devons nous considérer comme les oblats de ce monastère divin.

L'oblat et le monastère : Un oblat disait : ‘J'ai choisi ce monastère parce que, dans cette communauté, j'ai senti que les frères étaient des personnes normales avec leurs problèmes, leurs  qualités et leurs défauts, comme n'importe qui dans le monde’. Un oblat s’attache à un monastère d'abord, certainement, par un lien d’amitié. Puis le lien spirituel qui ne cesse de croître. Qui a fait l'expérience d'être aimé et d'aimer à son tour, sait cueillir dans l’autre le même potentiel ; il s'ouvre à la confiance. Comment ne pas s'enthousiasmer devant les immenses possibilités de renaître qui s’ouvrent dans toute relation d'amitié ! Le moine et l’oblat peuvent s'enrichir l’un l’autre, sur des itinéraires apparemment si différents. Mais le principal lieu de partage de découvertes se fait au sein de l’oblature. Nous sommes si respectueux de la sagesse dispensée au monastère, si dépendants des moines pour notre formation, que nous avons parfois négligé l’écoute mutuelle entre oblats.

La prière : Qui ne suit pas un ensemble de règles dans sa prière et qui ne prononce pas les prières traditionnelles de l'Eglise risque d'appauvrir sa prière et de la réduire à la sphère étroite de ses désirs et besoins individuels. La prière de Jésus ‘Seigneur Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant Sauveur, aie pitié de moi pécheur’ est la lumière qui illumine l'âme de l'homme et enflamme son cœur du feu de l'amour divin. C'est la chaîne qui relie Dieu à l’homme et l'homme à Dieu. Saint Dimitri de Rostov résume ainsi son enseignement sur la prière : ‘La brève prière du publicain ‘Seigneur aie pitié de moi pécheur’ a été exaucée. La prière du larron repentant se limite à ‘Souviens-toi de moi’ et le paradis lui fut accordé. Le fils prodigue et Zachée le collecteur de taxes ne disent rien mais reçoivent la miséricorde du Père et le pardon du Christ’.

Le dialogue interreligieux vise à mener chrétiens et autres croyants à un partage plus profond de la vie avec Dieu en communion les uns avec les autres. Agir pour la justice, être présent aux côtés des pauvres et marginalisés, favorise la rencontre entre les religions. Les religions sont appelées non à diviser l’humanité mais à l’unifier. Pour nous chrétiens, la Trinité est le modèle suprême du dialogue.

La mission : je crois que Dieu plante un ‘cœur bénédictin’ chez des hommes et des femmes qui vivent et travaillent partout où se décident les affaires du monde. Nos responsabilités respectives sur nos lieux de travail et de vie sont très différentes ; l’autorité du Christ nous donne en ces lieux beaucoup plus de poids que nous le croyons en général. Guéris de nos anciennes blessures, quand nous arrivons à franchir des limites qui nous semblaient infranchissables, quand nous usons de compassion là où régnaient auparavant la peur et la méfiance, alors nous commençons d’œuvrer à la transformation du monde et nous répondons à notre appel d'oblat. « Le trésor que constitue la Règle de saint Benoît ne peut rester enfermé dans les murs des monastères. Les richesses doivent être répandues dans le monde entier pour le bien de l’humanité et pour la plus grande gloire de Dieu » disait Notker Wolf, osb., Abbé Primat.

[1] Gen 1,28

[2] RB 31,10