Clément Pham  SÏ An, ocist, monastère Notre-Dame de Châu Thuy, Vietnam

                              "C'est en forgeant qu'on devient forgeron", dit le proverbe français. C'est mon cas. Je n'ai pas reçu une formation spécialisée pour assumer la tâche de la formation monastique. Cependant par l'amour de la vie cistercienne, de mon monastère et des frères, ainsi que par obéissance, je remplis cette tâche depuis douze ans. Ce laps de temps n'est pas grand chose ; il me permet cependant d'avoir quelques petites expériences que je suis heureux d'exposer humblement ici, avec l'ardent désir d''tre assisté par des Anciens expérimentés dans la question.

I. Situation concrète

Il faut tout d'abord situer mes expériences de la formation monastique dans ses conditions concrètes, c'est-à-dire après 1975 où notre pays est obligé de changer totalement son idéologie. Depuis lors, le changement continue son cours, d'étape en étape, de la période de la "porte fermée" à celle de la réforme et puis de l'économie de marché. On se trouve en outre dans un temps où les conditions sociologiques sont défavorables à la tradition chrétienne.

C'est pourquoi le nombre, ainsi que le caractère des nouveaux venus à notre monastère varie d'une période à l'autre. De 1975 à 1989, nous n'avons eu aucune recrue car notre monastère restait sous le strict contrôle de l'autorité civile : les jeunes gens ne pouvaient accéder que difficilement chez nous. C'était seulement vers l'année 1989 qu'un "léger vent de renouveau" a soufflé au Vietnam ; il nous a permis alors d'ouvrir petit à petit "la porte" de notre monastère pour l'accueil de nouveaux candidats. Pourtant il nous reste très difficile de savoir exactement le milieu d'où ceux-ci viennent, les tendances ou les dispositions qu'ils apportent au monastère, et même leurs problèmes individuels ou familiaux. Certains ont dû subir des circonstances dures et rebutantes, voire même des injures blessantes. Certains n'ont même pas la possibilité de poursuivre leurs études secondaires ou d'acquérir une connaissance suffisante de la doctrine chrétienne.

Dans une société si complexe où tout se transforme chaque jour et où on se sent instable, les chrétiens voient le monastère comme un lieu de paix. C'est la maison de Dieu, ou au moins une antichambre du ciel où on n'endure plus ou qu'un tout petit peu des souffrances d'ici-bas, où on peut goûter déjà le bonheur céleste et où ne demeurent que des hommes "saints", tout proches de Dieu. Certains voient le monastère comme un îlot prospère, un lieu d'espérance où en général on espère trouver un soutien soit spirituel soit matériel. D'autres savent que le monastère est une école du service du Seigneur, mais on ne sait pas exactement ce qu'est ce service. La réputation des dures mortifications, des veilles et des jeûnes qu'avait pratiqués la première génération de nos moines vietnamiens, reste profondément ancrée dans l'esprit de bien des gens.

En réponse à de telles conceptions du monastère, comment peut se fait la formation monastique ? Que peut-elle apporter aux nouveaux venus au monastère ? Quel est le devoir de ceux-ci ? Quelle est la tâche du formateur, c'est-à-dire du maître des novices ?

II. Nécessité de la formation et ses étapes

Évidemment, au Vietnam comme ailleurs, il est absolument nécessaire que les nouveaux venus au monastère reçoivent une bonne formation monastique, exactement comme on doit se former avant d'entreprendre un métier, comme une équipe de football ou des soldats doivent être entraînés ou exercés. Et cela se fait par différentes étapes, qu'on appelle l'initiation graduelle.

a. Période de recherche : ´ Viens et vois ª (Jn 1, 39)

Avant de pénétrer dans le monde nouveau du monastère, les aspirants doivent "venir et voir" sur place ce que c'est le monastère et puis entreprendre quelques contacts préliminaires. Nous les invitons à passer un certain temps à l'hôtellerie, où ils peuvent participer aux retraites, ou même faire des stages à l'intérieur du monastère. Ce séjour d'attente et de préparation avant d'être admis dans la communauté est obligatoire comme le demande la Règle de saint Benoît (RB 58). Durant ce séjour, il y a une intense collaboration entre les responsables de la communauté (notamment le maître des novices) et les candidats. Le maître va aider ceux-ci à découvrir l'appel de Dieu et la nature de l'attrait qu'ils ressentent pour la vie monastique. Ils doivent prendre conscience qu'on n'entre pas au monastère pour faire ou devenir ceci ou cela (par exemple faire des recherches scientifiques ou devenir prêtre), mais pour chercher Dieu de tout son coeur et de toute son âme. Entre temps, le maître va faire des tests pour savoir s'ils "cherchent vraiment Dieu, s'ils sont empressés au service de Dieu, à l'obéissance, aux humiliations" (RB 58). Il les fait entrer progressivement dans la communauté, en participant à l'Office divin, aux repas, au travail manuel, etc., tout en restant à l'hôtellerie.

S'ils manifestent des signes positifs d'une vocation à la vie monastique, comme le demandent la Règle de saint Benoît et les Constitutions de la Congrégation, le Supérieur les recevra et les présentera à la communauté par une simple cérémonie au chapitre. De leur côté, ils leur faut présenter au Supérieur les certificats nécessaires (de Baptême, de Confirmation, d'état libre, de santé, d'études) et n'encourir aucun empêchement indiqué par le droit canonique (can. 721, 642-645). Normalement cependant, notre monastère reçoit chaque candidat séparément ; et chaque année, nous ne recevons que 6 ou 7 candidats.

b. Période du postulat

Cette période peut être appelée la période de probation qui durera normalement deux ans. Elle a divers buts :

-  Aider les candidats à examiner sérieusement si Dieu les appelle réellement à embrasser la vie monastique, puis à décider leur réponse et leur engagement à l'appel de Dieu.

-  Aider les responsables à découvrir l'action de Dieu dans les nouveaux venus et à discerner plus précisément la maturité et les dispositions des candidats.

-  Ceux-ci profitent de cette période pour étudier l'histoire de l'Ordre et de la Congrégation, la Règle de saint Benoît, les Constitutions et les Coutumes de la Congrégation, la spiritualité monastique, la musique, l'anthropologie, etc.

... Ils apprennent ainsi à mieux connaître le monastère et l'Ordre où ils se trouvent, ainsi que les autres Ordres et leurs activités dans l'Église.

Après cette formation de base qui dure deux ans, certains de nos postulants peuvent recevoir tout de suite l'habit du novice ; d'autres doivent attendre encore un certain temps et peuvent être envoyés à Ho Chi Minh-Ville, en vue de perfectionner leurs études supérieures ou celles de langues étrangères, d'informatique, etc. ; ce nouveau temps d'attente et de préparation avant l'admission définitive dans la communauté varie d'un candidat à l'autre, afin de leur permettre d'obtenir le diplôme de fin d'études supérieures ou universitaires, selon leurs capacités. Ils retourneront ensuite au monastère, où après quelques mois de probation, ils pourront être admis au nombre des novices.

c. Période du noviciat

C'est la période d'intégration personnelle à la vie monastique. Elle durera normalement deux ans. Le novice fait l'expérience profonde et personnelle de ce qu'est la vie cistercienne comme elle est vécue dans notre monastère. Cette expérience englobera tous les domaines de la vie monastique, ainsi que de la vie chrétienne. Le novice devra apprendre à devenir un être capable de surmonter les difficultés de sa vie, en même temps que d'assimiler la spiritualité de la Congrégation. Il s'applique à étudier aussi les voeux qu'il va prononcer et qui ont en eux-mêmes une valeur de réponse d'amour oblatif au Seigneur.

Outre les cours (tels que la liturgie, les psaumes, la Sainte Écriture, la théologie monastique, la musique...) qui se trouvent dans le programme d'études monastiques et coordonnés avec ceux du monasticat, le maître doit revenir sans cesse à l'esprit du fondateur et au charisme des origines (Vat. II, LG 46 ; AG 40 ; PC 2).

Des tests doivent être continuellement faits au cours de ces premières années au monastère pour savoir si le candidat a une maturité suffisante pour assurer la vie propre de la Congrégation, à savoir :

-  une santé physique et psychologique normale,

-  un jugement sain et de la bonne volonté,

-  la ferme conviction que le Seigneur l'appelle à s'engager à Le servir hic et nunc dans ce monastère,

-  la pleine disposition d'embrasser les veilles, les jeûnes et les mortifications pour le salut des âmes, etc.

d. Période entre la profession simple et la profession solennelle

Après voir prononcé ses premiers voeux, le profès reste encore jeune dans la vie monastique. Il doit être aidé et soutenu pour compléter sa formation monastique. En même temps, il peut participer plus intensément aux activités et aux responsabilités de la communauté. D'une part, il suit les cours de base du monasticat comme la Sainte Écriture, le patrimoine cistercien, la patrologie, la liturgie... D'autre part, on peut lui confier une charge quelconque dans la communauté pour l'habituer aux responsabilités. Chez  nous, il s'agit normalement de prendre soin du jardin potager, de la culture du riz, des légumes, des fleurs ; ce sont des charges qui permettent aux jeunes profès de travailler tout en priant et tout en trouvant des moments de détente.

Pendant ces dernières années, pour une meilleure formation en philosophie et en théologie, nous devons envoyer nos jeunes profès à Hô Chi Minh-Ville où, de nouveau, "ils se trouvent au milieu du monde, mais ne sont pas du monde " (Jn 15, 19). Ils devront s'affronter encore une fois aux réalités de la vie quotidienne, qui les aident pourtant à avoir une meilleure maturité dans la pratique de leurs voeux monastiques. Les responsables devront donc les soutenir en leur témoignant leur paternelle sollicitude et générosité.

Cette période durera de trois à sept ans. Mais avant d'émettre ses voeux solennels, le profès simple devra retourner et rester au moins six mois de suite au monastère.

III. Devoirs du candidat

Le candidat s'initie et s'adapte ainsi progressivement à la vie monastique. D'étape en étape, il apprend l'art de chercher Dieu et de persévérer dans cet effort.

Quoi qu'il pense lors de son entrée au monastère, il se rendra vite compte qu'on n'entre au monastère que pour adhérer au Christ. C'est ce que demande l'...vangile, ainsi que la Règle : qu'on se débarrasse de tout pour suivre totalement le Christ (Lc 5, 11 ; 14, 26-27) qui est la source de la vie, la loi parfaite venant de Dieu et conduisant à sa lumière. L'initié à la vie monastique devra reconnaître que le Christ est le seul à pouvoir donner les vraies directives et les vraies récompenses. Il apprendra ainsi peu à peu à vivre et à mourir chaque jour pour le Seigneur (Rm 14, 7-8), à ‘tre crucifié avec le Christ, de sorte qu'il peut dire avec saint Paul : "Ce n'est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi" (Ga 2, 20).

Il n'a pas d'autre but que de chercher et aimer Dieu de tout son coeur et de toute son âme. Quant au monastère, avant d'être un lieu de paix, d'espérance, une antichambre du paradis, il est en premier lieu une école du service du Seigneur, où l'on enseigne et où l'on accomplit le service particulier : "ora et labora" afin qu'en toutes choses Dieu soit glorifié ª (RB 57, 9).

En réponse à l'appel que Dieu lui a offert, le candidat doit donc être empressé, comme dit le Prologue de la Règle de saint Benoît, à "écouter, incliner l'oreille de son coeur et recevoir l'instruction du Père qui aime" et qui parle à travers le maître et les responsables du monastère. Ensuite il va la mettre en pratique, "efficaciter comple". C'est l'attitude caractéristique et indispensable du moine qui doit être toujours disponible et attentif à l'écoute de Dieu. Le candidat devra donc être empressé à l'oeuvre de Dieu et à l'obéissance ; il va trouver dans l'Office divin et dans la lectio divina une large part de sa nourriture spirituelle.

Le caractère propre de notre Congrégation est de "sauver les âmes par la prière et les mortifications". C'est pourquoi tout candidat doit résister à la tentation de sacrifier la prière aux diverses oeuvres d'apostolat, "si urgente que soit leur nécessité" (cf. PC 7). Il doit être convaincu qu'une vie intérieure chargée de foi et d'expérience profonde des choses divines a une très grande fécondité apostolique : "in plenitudine contemplationis"  comme dit saint Thomas d'Aquin (Sum. théol. II-II, 288, 6). La récente lettre L'Église en Asie ne nous dit pas autre chose (n° 23).

Les mortifications dont parlent les Constitutions sont tout d'abord la séparation du monde, la vie en commun, les veilles et les jeûnes, le travail manuel, etc. Il faudra que les nouveaux venus les embrassent avec générosité, en union avec la passion du Christ Rédempteur et à cause de l'amour pour Lui. Il est vrai qu'un des gros problèmes pour nos jeunes nouveaux venus est la séparation de leurs parents, frères et soeurs ; celle-ci devient très dure pour les Asiatiques. Pourtant on les persuade que la communauté monastique est une vraie famille, où on a le Supérieur pour père à la façon du Christ au milieu de ses disciples. On s'y aime mutuellement d'un "chaste amour fraternal" (RB 72, 8). Mais il leur faut prendre conscience aussi que cette communauté se compose et de saints et de pécheurs (cf. Mt 13, 24-30), de sorte que saint Benoît demande qu'on dise chaque jour l'oraison dominicale à la fin des Laudes et des Vêpres (RB 13). La vie communautaire devient ainsi l'un des moyens les plus importants de la transformation des individus en membres du Christ.

Comme la séparation du monde, l'absence du sommeil par les veilles et l'abstinence par le jeûne allègent le corps et rendent l'esprit plus attentif à l'appel de Dieu.

Quant au travail, il a sa forte efficacité éducative. Par le travail, le moine marche à la suite du Christ, qui a donné au travail une dignité éminente, en oeuvrant de ses propres mains à Nazareth (cf. LG 41). Comme pour tout le monde, le travail a pour but de procurer les ressources dont on a besoin pour vivre, mais aussi de gagner pour pouvoir faire l'aumône (cf. 2 Th 2, 10). Les Constitutions de la Congrégation considèrent le travail comme un élément important pour combattre les vices, soutenir la prière et contribuer à la sanctification. On travaille pour prolonger l'oeuvre du Créateur (cf. AG 34), coopérer à l'achèvement de la création divine (cf. GS 34, AG 67) et à son élévation (LG 41).

Enfin il est à noter que, bien que le premier rôle revienne à l'Esprit Saint et à Marie dans la formation monastique, ainsi que la contribution des différents agents de la formation, la part du nouveau venu lui-même est irremplaçable. Tout d'abord il lui faut "incliner l'oreille de son coeur" (RB. Prol.), c'est-à-dire être profondément disponible et attentif à l'appel du Père et aux "motions" de l'Esprit Saint ; ensuite, il s'appliquera au labeur de l'obéissance, condition indispensable pour se conformer au Christ.

IV. Tâche du formateur

Pour mener à bon terme la formation monastique, le maître des novices doit montrer tout d'abord à ses disciples le Seigneur Jésus comme le modèle et la voie vers Dieu qui aime et qui appelle. Il les invite à marcher à la suite du Christ qui vit sans cesse avec le Père, pour le Père, dans le Père, et qui ne peut rien faire contre la volonté du Père (Jn 6, 38). C'est à son exemple qu'ils acceptent de tout perdre, "afin de Le gagner, Lui devenir conformes dans sa mort" (Rm 6, 5 ; Ph 3, 7-11), "car en Lui habite corporellement toute la plénitude de la divinité" (Col 2, 9).

Avec le temps, le maître amènera ses novices à comprendre que notre Règle de saint Benoît, au-delà des règlements, n'est qu'une application de l'Évangile aussi radicale que possible. C'est donc l'exemple du Christ que saint Benoît nous invite à suivre pour entrer dans l'intimité du Père ; et il adresse cette invitation aux candidats provenant de toutes les conditions sociales, même à des faibles devant Dieu.

Le maître prend alors conscience que tout ce qui, dans la Règle de saint Benoît, est dit de l'Abbé, du cellérier et des autres officiers du monastère, vaut aussi pour lui dans toutes ses relations avec ses novices. Il leur montrera "tout ce qui est bon et saint, plus par ses actes que par ses paroles" (RB 2, 12) ; c'est ainsi qu'ils peuvent l'écouter et le regarder pour marcher à la suite du Christ. "Verba volant, exempla trahunt", le maître se mettra donc en garde contre le divorce entre le dire et le faire.

Parmi toutes les qualités importantes cependant, il s'appliquera en premier lieu à la discrétion qui consiste à éviter l'excès dans les ordres, la correction. Cette ´ vertu-mère ª suppose d'ailleurs chez lui une ‚me paisible qui est bien décrite dans RB 64. Elle lui permet de se conformer et de s'adapter selon le caractère et l'esprit de chacun de ses novices, et de fournir à chacun d'eux l'aide spirituelle dont il a besoin.

Il faut remarquer en outre que, pour bien conduire le débutant à la vie monastique, le maître doit savoir l'écouter et susciter chez lui la confidence libre. On sait que l'entretien personnel est un moyen fondamental de formation qu'il convient de pratiquer avec régularité et avec une certaine fréquence. C'est ainsi qu'avec le temps, le maître arrivera à découvrir les dons et les capacités de chaque candidat et ensuite à lui confier telle ou telle responsabilité de la communauté.

Une bonne entente entre le maître et le candidat, comme celle entre le maître et le Supérieur, contribue largement au progrès du candidat dans la vie monastique.

Et par-dessus tout, pour que les novices arrivent à se conformer au Christ, le maître leur apprendra à se laisser inspirer, pousser et conduire par l'Esprit Saint. C'est l'Esprit qui les mène à la vérité tout entière (Jn 16, 13), qui leur fait comprendre la personnalité mystérieuse du Christ, et qui leur enseigne tout (Jn 14, 26). C'est ce que saint Benoît aborde bien souvent dans sa Règle en parlant du travail de la grâce et de l'Esprit Saint dans l'âme (RB Prol. ; ch. 5 ; 7 ; 20 ; 72 ; 73).

Enfin, par sa filiale dévotion à la Sainte Vierge et sa fidélité à prier le rosaire, le maître montrera à ses novices que la présence de Marie a une importance fondamentale dans la vie spirituelle de chaque âme. Par son exemple, Marie leur enseigne à répondre de façon toujours plus généreuse à l'appel de Dieu, à dire Fiat devant toutes les circonstances de la vie.

Cela dit, je peux noter ci-dessous ce que nous pouvons considérer comme fruits de notre formation : le nombre des novices et des profès solennels pendant ces dix dernières années (1991-2000).

Au contingent des recrues :

.  de 1991 : des 4 novices, il nous reste 1 profès solennel,

.  de 1992 : des 2 novices, il nous reste 1 profès solennel,

.  de 1993 : des 5 novices, il nous reste 3 profès solennels,

.  de 1994 : des 2 novices, il nous reste 1 profès simple qui se prépare à faire la profession solennelle,

.  de 1995 : des 4 novices, il nous reste 2 profès solennels et 1 qui se prépare à faire la profession solennelle,

.  de 1996 : des 3 novices, il nous reste 1 profès simple qui se prépare à faire la profession solennelle,

.  de 1997 : des 4 novices, nous avons actuellement 4 profès simples,

.  de 1998 : des 4 novices, nous avons actuellement 4 profès simples,

.  de 1999 : des 2 novices, nous avons actuellement 2 profès simples,

.  de 2000 : nous avons 2 novices, qui tous les deux se préparent à faire la profession simple.

Conclusion

À une époque où la culture de notre pays se détache de plus en plus des valeurs religieuses, j'ai la pleine conviction que la tâche du maître des novices est une tâche très noble, quoiqu'elle soit bien difficile. Je peux emprunter cette parole de saint Paul pour m'adresser à mes novices : "Mes petits enfants, c'est vous que, dans la douleur, j'enfante à nouveau jusqu'à ce que le Christ soit formé en vous" (Ga 4, 19). Mais avec saint Benoît je peux assurer à chacun d'eux : "Avec l'aide du Christ, tu parviendras" (RB 73, 8-9).

Je sens qu'en remplissant cette tâche de formation monastique, je ressemble bien à cette veuve indigente qui n'a que deux piécettes à offrir au Seigneur (cf. Lc 21, 1-4). Plus d'une fois, je sais cependant au fond de mon coeur que ce n'est pas moi qui agis, c'est l'Esprit du Christ qui vit en moi et qui agit sur mes novices (cf. Ga 2, 20). De jour en jour, d'année en année, je n'ai que ce seul désir : que mes novices cherchent vraiment Dieu et trouvent pleinement Dieu. Et que leur coeur se dilate et qu'ils "ne préfèrent rien à l'amour du Christ" (RB 4, 21). C'est seulement en goûtant cette "indicible douceur d'amour" (cf. RB Prol, 49) qu'ils peuvent rendre présent au monde le Christ lui-même par leur témoignage monastique, comme il le souhaite "Vous serez mes témoins" (Ac 1, 8).

Enfin, il est aussi normal qu'il y ait des initiés à la vie monastique qui ne remplissent pas les conditions pour un appel à la vie cistercienne et qui doivent retourner ensuite dans le monde. En tant que leur père et leur guide spirituel, je les accompagne donc tout au long de leur recherche de la volonté divine et de leur décision. Je les aide à accepter cette décision, non pas comme un échec, mais comme un appel à servir le Seigneur dans un lieu et par des voies qu'il leur indique. Ils retourneront alors dans le monde, en emportant avec eux une nouvelle source de vie et en regardant désormais la vie sous un autre angle.

Depuis des années, notre communauté a la joie de voir qu'un bon nombre de nos anciens novices ou profès simples participent avec ardeur et dévouement aux différentes activités de leur paroisse et y jouent un rôle prépondérant. La formation qu'ils ont reçue au monastère ne reste donc pas vaine. Nous tous sommes ainsi heureux d'apporter notre contribution à la formation de fervents fidèles et de bons catéchistes en vue de leur mission d'annoncer la Bonne Nouvelle et de rendre témoignage du Christ par leur vie chrétienne exemplaire (cf. l'Église en Asie, n° 45). Grâces soient rendues à Dieu !