Une bénédictine disait un jour : « C'est étonnant comme la vie devient compliquée dès que l'on vit ensemble pour suivre le Christ Pauvre... » Des frères ou des sœurs viennent au monastère, ils n'ont qu'un but « chercher Dieu » ; les moyens proposés par la Règle de saint Benoît pour tendre vers ce but vont entraîner un certain nombre de charges économiques qui font partie de la vie même de la communauté.
Tous les monastères, qu'ils connaissent la pauvreté ou l'aisance, dans tous les continents doivent loger les frères ou les sœurs (donc entretenir des bâtiments), assurer les repas de chaque jour, le vêtement, le soin des malades ou de ceux et celles que l'âge affaiblit, disposer de livres pour la lectio, assurer les dépenses de la célébration liturgique, aider les plus pauvres, exercer l'hospitalité, etc.
C'est normalement par leur travail que les disciples de saint Benoît font face à ces devoirs constitutifs d'une vie cénobitique, mais ces travaux peuvent être d'une grande variété : travaux où frères et sœurs produisent directement ce qui leur est nécessaire, travaux qui aboutissent à des ventes, et permettent ainsi d'acheter, travaux intellectuels, sociaux ou pastoraux entraînant une rémunération ou des dons, travaux en collaboration avec des salariés, etc.
Mais il ne faut pas enfermer notre vision des choses dans un seul modèle, le contexte ecclésial, le contexte social, l'âge du monastère entraînent des pratiques diverses. Témoins trois monastères d'Amérique centrale : le premier vit de son école, mais peu de moines y travaillent ; d'autres sont curés ; les plus jeunes sont aux études et font le ménage de la maison ; il y a des projets d'établir des ateliers, mais c'est pour l'avenir. Dans le second, jeune fondation, quelques jeunes sont aux études, d'autres font le ménage, la communauté vit surtout de dons. Dans le troisième, fondation naissante, les quelques moines présents n'exercent aucun travail rémunérateur.
Chaque communauté s'adapte aux circonstances, tout en connaissant la valeur monastique du travail qui permet à la communauté d'assurer sa propre subsistance. L'expression « gagner sa vie » recouvre tout cela et dit bien qu'il s'agit de toutes manières d'un labeur. Ces travaux jouent un rôle fondamental dans la conversion monastique selon la Règle de saint Benoît, et leurs modalités concrètes contribuent à façonner spirituellement les personnes et les communautés.
Nous avons donc commencé à réunir quelques exemples de la manière dont des monastères gagnent leur vie. Ce dossier devrait permettre d'échanger des expériences et d'aboutir à une réflexion pratique et spirituelle.
Ce qui est présenté aujourd'hui n'est volontairement qu'un commencement. Certains monastères, connaissant notre projet, ont envoyé à la rédaction sous des formes diverses la description de leurs travaux ; d'autres ont choisi de répondre point par point à une grille-questionnaire qui leur avait été proposée. D'autres réponses paraîtront dans un prochain numéro. Des photos, même sans commentaire, sont aussi une parole sur les travaux et sur la conversion monastique.
Voici les questions soumises à une réflexion qui puisse s'enraciner dans les situations réelles.
1. Votre travail vous permet-il de gagner la vie matérielle de votre monastère pour les dépenses habituelles (il ne s'agit pas des constructions et investissements) ? Quels sont vos travaux ?2. Ces travaux contribuent-ils au progrès personnel, à la maturation monastique des frères/sœurs et de la communauté ? De quelle manière ? Quelles qualités développent-ils ?
3. Quel est approximativement l'horaire de travail, varie-t-il au cours de l'année ? Comment se vit l'équilibre avec l'Office, la lectio, les temps de prière solitaire, les réunions de communauté, l'hospitalité ?
4. Vos travaux contribuent-ils au progrès humain et économique de vos voisins, du pays ? Comment s'inscrivent-ils dans votre environnement ?
5. Votre travail suffit-il à faire vivre la communauté ? Si vous ne gagnez pas entièrement votre vie par votre travail, quels moyens avez-vous pour compléter ce qui vous manque ?
6. Avez vous d'autres remarques à faire sur la question de gagner sa vie ?
Tous les monastères qui voudront bien communiquer la description de leur manière de gagner leur vie et leurs réflexions sur ce sujet (avec photos ou dessins si possible), soit en s'inspirant de cette grille, soit sous des formes mieux adaptées à leur situation, intéresseront tous les genres de lecteurs du Bulletin : monastères que l'expérience des autres enrichira, éclairera, encouragera ; amis qui cherchent dans la Règle de saint Benoît une lumière pour leur vie quotidienne avec toutes ses exigences humaines et chrétiennes ; grands Organismes prêts à soutenir les investissements des monastères pour une meilleure autonomie, etc. Partager ce qui fait la vie d'une communauté est un dialogue en actes irremplaçable.
Une grande question : l'environnement.
Nos manières de travailler touchent directement à une grande
question actuelle, d'intérêt mondial, celle de l'environnement.
Les monastères sont souvent à l'origine d'initiatives intéressantes,
parfois ambitieuses, parfois modestes mais très fructueuses par
leur modestie même. Un prochain bulletin ouvrira une recherche dans
cette ligne. Merci d'y penser déjà et de nous communiquer
expériences et questions. m
À l'abbaye de Shanti Nilayam, Bangalore, Inde
Teresita d'Silva, osb, Abbesse
Notre abbaye de Shanti Nilayam a été fondée par l'abbaye St Cecilia de Ryde, Île de Wight, Angleterre. Le premier groupe de sœurs indiennes est venu à St Cecilia en 1963. En 1965 deux pionnières qui étaient membres de la communauté de Ryde furent envoyées en Inde. Un terrain de 5 ha fut acheté dans le village de Byrathi à Bangalore en 1965. Les sœurs indiennes regagnèrent leur patrie en 1969. Le monastère et la chapelle étaient alors construits et la bénédiction eut lieu le 20 juillet 1970, après quoi les pionnières retournèrent en Angleterre. Dès le commencement nous nous sommes efforcées de subvenir nous-mêmes à nos besoins en assumant des tâches compatibles avec notre vie monastique contemplative, avec sa devise « ora et labora ». Nous avons aussi conservé la totalité de l'Office avec la célébration quotidienne de l'Eucharistie et la Liturgie des Heures. Entre les offices, il y a des temps pour l'oraison, l'étude et le travail. La prière alterne avec le travail, et le travail devient une prière. Étant donné que notre vie entière a été consacrée à Dieu, tout ce que nous faisons a une valeur surnaturelle. En tant que communauté contemplative dans un pays pauvre nous avons toujours dû dépendre de notre travail pour assurer notre subsistance. Saint Benoît au VIe s. reconnaissait la dignité du travail, car il dit dans la Règle : « C'est alors qu'ils sont vraiment moines lorsqu'ils vivent du travail de leurs mains ainsi que nos Pères et les Apôtres » (RB 48).
Nos travaux
À l'instar des premiers bénédictins, nous cultivons la terre, faisons pousser des céréales, des fruits et des légumes. Nous élevons des poules et des poulets, nous avons une laiterie, des cocotiers et une vigne. Nous fabriquons des hosties, des vêtements liturgiques et des cartes de vœux. Dans la vie monastique il ne nous est pas demandé de renoncer à nos dons naturels, mais de les mettre au service de Dieu.
Volailles
Nous avons commencé l'élevage des volailles en 1970, l'année de la bénédiction de notre monastère. Le 8 septembre, en la Nativité de la Vierge nous avons vu une annonce dans le journal de 45 poules pondeuses à vendre. Nous avons invoqué l'intercession de Notre-Dame et avons décidé d'acheter ces volailles ; nous avons contacté M. Sebastian d'India Poultry Farm qui faisait l'élevage de l'espèce Rani Shavar. Il s'est intéressé personnellement à notre ferme et nous a donné d'utiles conseils. Par la suite, grâce à un don, nous avons construit notre premier poulailler pour 500 pondeuses et avons commandé les poussins d'un jour qui provenaient des incubateurs d'India Poultry Farm. Avec les bénéfices de ce premier essai nous avons construit un poulailler pour 1.000 poules en utilisant le système de litière épaisse dans lequel les oiseaux sont sur une couche de 15 cm d'enveloppes de riz. En six mois les crottes des oiseaux transforment cette litière en excellent engrais qui est utilisé dans les champs. Par la suite nous avons construit trois autres bâtiments et avons adopté le système des cages qui économise du travail. Nous avons maintenant 8.000 volatiles, à différents stades, poussins de quelques jours, poules pour la ponte et pour l'élevage. Comme les prix de la nourriture pour les volailles ont augmenté, nous achetons les ingrédients de base, comme le maïs ou d'autres grains selon la saison, et nous manufacturons nous-mêmes la nourriture selon une formule courante. Nous avons constaté que l'élevage des poules est une source de revenus appréciable qui contribue à notre autofinancement. À Bangalore, le climat convient pour l'élevage des poulets. Les œufs sont vendus à un négociant avec qui nous sommes en contact, qui passe les prendre avec sa camionnette deux ou trois fois par semaine.
Crémerie
Notre crémerie a démarré en 1971 avec une vache dénommée Sundari, ce qui veut dire « Belle ». C'était un croisement de Jersey-Holstein et avec elle venait son petit veau, Surya (Soleil). Nous avons maintenant une douzaine de vaches et une demi-douzaine de veaux. Nous employons le lait pour la communauté, et une partie est vendue pour payer la nourriture. La bouse est utilisée comme engrais dans les champs, et aussi pour fabriquer par fermentation du gaz (gober gas = gaz de bouse de vache) qui est récupéré pour faire la cuisine.
Cocotiers et caféiers
En 1970 nous avons aussi acheté 200 jeunes cocotiers de l'espèce Tiptur que l'on trouve dans des pépinières à Bangalore. Les arbres ont maintenant poussé et nous rapportent un petit revenu. Sous leurs ombrages nous avons planté 1.400 plants de café et installé un système d'irrigation par écoulement. Les caféiers ont besoin de beaucoup d'ombre. Comme les cocotiers et les caféiers ont besoin d'être irrigués en saison sèche, avec l'aide de l'AIM nous avons foré un puits.
Dès le début nous avons fait pousser des légumes, du riz, des pommes de terre... Nous avons aussi essayé les champignons et les mûriers. Nous avons la pluie durant la mousson de juillet à septembre, mais les pluies sont insuffisantes même à cette époque et nous dépendons du puits que nous avons foré en plus des puits ouverts.
Le 5 août 1985 nous avons acheté un motoculteur Mitsubishi offert par les monastères hollandais par l'intermédiaire de l'AIM. Il a aussi une remorque pour le transport de gros chargements à la ferme.
Hosties
Le 10 novembre 1974 nous avons reçu une machine à fabriquer les hosties que le P. Mayeul de Dreuille, osb, a rachetée à des Carmélites en France qui en avaient acheté une autre. Nous en avons ensuite reçu une seconde qui était un don de l'AIM. Notre troisième machine pour fabriquer des hosties épaisses est venue de la Mère Prieure des bénédictines de Ste Lioba. Nous fournissons maintenant les hosties aux paroisses et communautés religieuses de Bangalore. Les hosties épaisses sont destinées au Centre National Biblique, Liturgique et Catéchétique de Bangalore. Nous sommes reconnaissantes à nos bienfaiteurs qui nous ont aidées dans ce travail tout à fait monastique. Nous découpons encore nos hosties une par une, ce qui représente un travail considérable. Nous serions reconnaissantes de recevoir une machine à découper électrique.
Vigne
En 1975 le terrain au bout de la propriété a été nivelé et on a creusé 800 trous. 454 colonnes de pierre ont été achetées à la carrière voisine. Le 8 mars de la même année, 800 plants de vigne de la variété Thomson sans pépins ont été achetés. Nous avons reçu l'aide de M. Gopal, le viticulteur des jardins du Gouvernement, les célèbres jardins Lalbaug. Plus tard nous avons planté la variété « bleu-Bangalore ». Les jeunes pousses ont été arrosées avec des seaux d'eau puisés au puits. Par la suite une pompe électrique et des canaux d'irrigation y ont été substitués car les plants poussaient, et un puits foré a été installé grâce à une subvention de l'AIM. Nous faisons deux récoltes par an, une en mars et une autre en septembre. Les raisins sont vendus et avec une partie nous faisons du vin de messe et du vin de table qui est vendu sur place, à l'abbaye. Nous faisons aussi de la confiture pour nous.
Hospitalité
Notre maison de retraite, Prarthana Nilaya, Maison de Prière, a été bénie par Mgr Hunold le 11 mai 1986. 12 sœurs de Bethany ont commencé leur retraite ce jour-là pour se préparer au jubilé d'argent de leur profession. L'hospitalité est offerte à des individuels et à des groupes de sœurs, professes, professes temporaires, novices, postulantes, et aussi à des prêtres, des frères et des laïcs qui viennent pour des journées de retraite ou de récollection, ainsi qu'à des jeunes filles qui désirent réfléchir à leur vocation pour la vie monastique.
Boulangerie
Nous avons eu la bénédiction de notre boulangerie, « Bethléem », le 8 septembre 1987. Elle a un four et un pétrin électriques, et nous fabriquons du pain, des gâteaux, des petits pains et des biscuits pour la communauté, les retraitants et les hôtes.
Cartes
À partir de 1988 nous avons commencé à faire à la main des cartes de vœux en utilisant la moelle de tapioca pour les pétales de fleurs et en imprimant manuellement les textes à l'intérieur. Par la suite deux sœurs ont appris la sérigraphie. L'atelier d'art a été bénit en 1991. Nous vendons des cartes de vœux, nous faisons du papier à en-tête et des cartes de visite. Quelques sœurs font des vêtements liturgiques, des aubes, des étoles et des ceintures.
Évaluation
Avant le renouvellement des charges qui a lieu le 1er mai à la fête de St Joseph Travailleur, les sœurs évaluent le travail de l'année en répondant, dans un esprit d'ouverture et de sincérité, à un questionnaire qui comporte 26 questions sur le travail et leur réponse à l'invitation du Seigneur à être généreuses dans leur travail. Cette évaluation aide à programmer le travail de l'année suivante et à procéder aux affectations. Une fois par mois les responsables des divers secteurs ont une réunion avec l'Abbesse et les cellérières pour coordonner le travail. Nous avons toujours dû faire très attention que le travail ne devienne pas excessif, ne demande pas trop de temps, n'épuise pas l'énergie et les ressources émotionnelles. Saint Benoît nous avertit de ne pas négliger le soin des âmes en ayant davantage le souci de choses éphémères et périssables. Nous remercions Dieu de ce que au cours de toutes ces années nous avons fait l'expérience de sa providence aimante. Il ne nous a jamais abandonnées, Il est toujours venu à notre secours au moment opportun par l'intermédiaire des amis qu'Il inspire pour nous venir en aide. Lors des conférences et entretiens hebdomadaires les sœurs sont encouragées à considérer le travail comme une participation à l'activité créatrice de Dieu. Bien que ce soit difficile et pénible au début, chacune des sœurs, à un moment donné, est arrivée à comprendre en profondeur notre devise monastique ora et labora, et à travers les difficultés dans le contexte du travail manuel elles ont fait l'expérience de l'intervention de Dieu, et c'est ainsi qu'a grandi leur confiance en Lui.
Dans ces moments-là
la dichotomie entre travail et prière disparaît. C'est toujours
une joie et une consolation d'entendre les expériences de foi qu'ont
faites les sœurs, de quelle merveilleuse façon Dieu est à
l'œuvre dans nos vies. Nous essayons de transmettre les valeurs authentiques
de l'héritage bénédictin à la nouvelle génération
des sœurs du prochain millénaire que nous venons de commencer :
« Qu'en toutes choses Dieu soit glorifié. » m
Au monastère bénédictin Masina Maria, Mahitsy, Madagascar
Interview des frères Silouane, Marie-Épiphane et François de Sales
Préambule
Notre Communauté de
Mahitsy (30 km au Nord-Ouest de Tananarive) vit depuis de longues années
d'un élevage de poules et coqs reproducteurs en vue de la vente
des poussins et des œufs. Depuis peu, nous exploitons plus méthodiquement
notre grande forêt de pins qui entoure le monastère. Une petite
ferme et le rucher, ainsi qu'un tout petit magasin religieux complètent
notre gagne-pain. Des comités d'emplois aident à la gestion.
F. Silouane, F. Marie-Épiphane et F. François de Sales, vous êtes respectivement hôtelier, responsable du verger et de la ferme, responsable du rucher. Quel sens donnez-vous à votre travail dans le cadre du monastère ?
w F. Silouane - L'hôtellerie n'est pas vraiment un « emploi lucratif », elle est d'abord là pour permettre à la communauté d'accueillir et d'aider nos hôtes à mieux connaître et suivre le Christ. Ce qui me vient à l'esprit, c'est le conseil de saint Benoît : avant tout, chercher la gloire de Dieu en toutes choses. C'est vraiment mon souci jusque dans les tâches les plus matérielles.
w F. M.-Épiphane - Oui, pour moi aussi, ce qui suppose qu'on fasse son travail avec cœur. Mais le travail monastique est aussi un gagne-pain nécessaire pour la communauté. J'ai là une responsabilité à assumer.
w F. F. de Sales - Pour ma part, le travail fait d'abord partie intégrante de la vie monastique : ora et labora, la Règle le demande comme une nécessité pour fuir l'oisiveté et faire vivre la communauté. Par ailleurs, je travaille avec des abeilles, donc des animaux inconscients ; toute la responsabilité me revient. Si le rucher ne produit pas, c'est moi qui suis en cause, je n'aide pas le monastère à vivre. Il me revient de protéger, de veiller sur les abeilles, de ne pas les contrarier non plus, car elles réagissent.
Le monastère compte encore pas mal d'ouvriers, comment vous situez-vous par rapport à cela ?
w F. Silouane - L'ouvrier qui m'aide à l'hôtellerie est un salarié, sa journée terminée, il rentre chez lui et reçoit le fruit de son travail en fin de mois. Mais moi, je suis responsable de ce qui se vit à l'hôtellerie ; je ne peux me décharger sur un autre : « La grosseur de la motte prouve l'ardeur au travail », dit un proverbe.
w F. M.-Épiphane - Il ne s'agit pas seulement de gérer son emploi, d'en accomplir les devoirs, il faut encore réussir, imaginer, inventer. Un proverbe malgache le dit : « Asa vita no hifampitsarana », « C'est au résultat qu'on juge quelqu'un »... Récemment, par exemple, je me suis aperçu que les restes de la cuisine étaient donnés à l'extérieur ; j'ai donc proposé, au comité verger-élevage, qu'on achète un cochon à engraisser. La porcherie est déjà en construction, j'en assume moi-même la direction. Un autre frère a lancé l'an dernier un élevage de carpes royales, on a construit pour cela deux petits viviers.
w F. F. de Sales - Les ouvriers salariés travaillent bien, mais ils ne se sentent pas responsables de l'emploi. En réalité, l'expérience quotidienne nous prouve combien est juste la parole de saint Benoît : « Ils seront vraiment moines s'ils vivent du travail de leurs mains », comme dit ce proverbe de chez nous, proche de la sentence de saint Paul : « Izay miasa mendrika mihinana », « Celui qui travaille mérite de manger ».
À Madagascar, on sent une influence de l'Occident sur la manière de travailler. En ville, rien ne se fait sans argent. Les gens ont donc tendance à travailler beaucoup et à mettre de côté autant que possible. Ils sont soumis à cette astreinte des horaires réguliers qu'on ne connaît pas à la campagne.
Nos ouvriers, par exemple, travaillent souvent un jour sur deux, car ils ont presque tous quelques rizières et un peu de bétail dont il faut bien s'occuper. Le salaire n'est qu'un complément indispensable, même s'il est en soi insuffisant pour faire vivre leur famille. En fait, ils mènent une vie d'ouvrier-paysan. Leur mentalité est très différente de celle des citadins à ce point de vue.
À la campagne, on est souvent encore dans une économie de subsistance : c'est le sakafo, la nourriture qui est prioritaire ; en ville, c'est le salaire. Cela modèle une mentalité.
Au monastère, les nombreux jeunes frères essayent de prendre les choses en main progressivement, même si le temps donné aux études est prioritaire. Peu à peu, les projets prennent forme qui permettront un jour de réduire le nombre des ouvriers, encore nécessaires dans ce type d'économie, et de gérer par nous-mêmes notre gagne-pain. Rien de tel pour forger un esprit de famille et rassembler les frères autour d'un projet de vie qui dépasse, bien sûr, le travail et l'aspect économique. « Asa vadi-drano tsy vita raha tsy hifanakonana », « L'union fait la force ! » m
Propos recueillis par Christophe Vuillaume, osb, Mahitsy
Au monastère bénédictin de Mambré, Kinshasa, Rép. dém. du Congo
Interview de Gilbert-François KAB.KABAMBA, osb, Prieur
Q. Père Gilbert-François Kab.Kabamba, vous êtes Prieur de votre communauté depuis 1998. Le monastère de Mambré a été fondé en 1978 par le monastère de Clerlande en Belgique, n'est-ce pas, comment la communauté est-elle actuellement constituée ?
R. Notre communauté compte actuellement dix-neuf membres : douze profès perpétuels, trois profès temporaires et quatre novices.
Q. Comment gagnez-vous votre vie ?
R. Nous avons créé plusieurs ateliers :
La ciergerie
La plupart des matières premières sont importées de l'Europe : les mèches, la stéarine, les colorants. Nous pouvons acheter sur place la paraffine. C'est un bon atelier, même si on n'y travaille que périodiquement. Il est rentable. Nous fournissons des cierges aux paroisses et communautés religieuses de Kinshasa. Tous les ans nous vendons plus de cent cierges pascals.
La palmeraie
La concession du monastère offre à la communauté une plantation de plus de 1000 palmiers parsemés, qui rend la récolte très difficile. Nous avons commencé une plantation systématique. Un premier essai est de 60 plants.
Pour extraire l'huile de palme, nous collaborons avec un laïc des environs. Il fait la récolte et extrait l'huile chez nous. Il gagne 30% du produit fini, soit en nature soit en argent, selon les arrangements particuliers avec le frère responsable. C'est une unité rentable, mais la production est faible, plus ou moins 200 litres par mois à raison de deux extractions chaque mois. Nous essayons de développer cette plantation de manière plus rationnelle.
La boulangerie
Nous travaillons essentiellement pour fournir du pain à deux quartiers : Lutendele et Mbudi. Malgré les difficultés à se procurer de la farine, le nombre réduit des clients, la comptabilité qui n'est pas au point, la boulangerie est rentable, car elle est un souffle économique nouveau pour le monastère. Un certain nombre de femmes du quartier viennent s'approvisionner chez nous pour revendre ensuite le pain. Des questions nouvelles surgissent ces derniers temps.
Le poulailler
C'est une unité à échelle domestique. Il n'y a pas grand chose à dire là-dessus. Nous venons de le relancer après huit mois d'interruption due à diverses circonstances.
D'ores et déjà les pères Prémontrés, qui ont une grande activité dans ce domaine, nous préviennent que cet élevage n'est plus rentable à cause des aliments qui coûtent de plus en plus cher. Nous trouvons là les difficultés que connaissent beaucoup de monastères en Afrique avec les poulaillers : le prix de l'entretien des poules (provendes, vaccins, traitements divers) en font une source de revenus très peu rentable et difficile à gérer.
Le potager
Il fournit essentiellement les légumes à la cuisine, et quelquefois on en vend à l'extérieur. Il est toujours déficitaire. Un frère et un ouvrier y travaillent à temps plein.
La Menuiserie métallique
C'est certainement un atelier intéressant. Il nous a permis de fabriquer toutes les fenêtres, les portes métalliques du Centre de Santé, sans oublier les autres travaux antérieurs, grâce à la compétence du F. Gabriel (ancien élève des frères salésiens de Lubumbashi), et avec l'aide d'un ouvrier. Étant donné que le frère est aux études, cet atelier ne peut pas accepter de commandes de l'extérieur actuellement. Mais quand il fonctionne, il est plein d'espoir.
Le garage
Nous assumons les trois-quarts des réparations en communauté, sous la responsabilité des F. Willy, Égide et de papa Kikuma, notre chauffeur-mécanicien. Ce qui nous coûte, ce sont les pièces de rechange. Étant donné la vétusté de nos voitures, mais aussi la mauvaise conduite, la surcharge et le mauvais état des routes, cet atelier nous coûte très cher. Car à lui seul, il prend 25 à 45% du budget ordinaire du monastère. Nous ne voyons pas encore comment faire. Il nous faut certes un souffle nouveau, c'est-à-dire remplacer ces deux voitures par d'autres qui soient neuves.
L'hôtellerie
Nous accueillons essentiellement pour des retraites individuelles ou communautaires, des récollections, des journées d'évaluation, des sessions de formation, des séminaires, un accompagnement personnel, et quelquefois pour le repos des personnes convalescentes. Notre hôtellerie est sous-employée à cause du mauvais état de notre route, du pouvoir d'achat très réduit de la population, et enfin parce qu'il y a beaucoup de maisons de retraite dans la ville. Comme la plupart des hôtelleries de monastères en Afrique Centrale, ce n'est pas une source de revenus, c'est un service d'Église.
Q. Père, voulez-vous nous parler aussi de vos réalisations sociales, car si elles ne sont pas d'abord lucratives, elles sont une participation concrète et efficace au développement de votre région. Et elles sont une part importante de votre activité.
R. Tous nos projets sont couverts par une ASBL dénommée ADIM (Association de Développement Intégré de Mambré et ses alentours) qui a une ONG requérante en Belgique FAR (Fondation André Ruyckmans), et une ASBL requérante CCMK, (Coopération Clerlande - Mambré Kinshasa) qui peut devenir une ONG aussi.
Nous avons des projets qui sont opérationnels, et d'autres en voie d'être réalisés. La concession du monastère est divisée par un ruisseau. Un versant est réservé aux projets : Centre de Santé ; Solidarité agricole ; École agro-vétérinaire... Cette colline desservie en eau par un réservoir de 60 m3 est alimentée par une pompe électrique grâce à la générosité de la Croix du Sud, et le complément fraternel de CCMK.
Le Centre de Santé
Nous organisons, une fois la semaine, des consultations préscolaires. Une fois par mois, nous recevons les enfants mal nourris avec distribution à bas prix de farine de soja, de maïs et du lait. Les vaccinations contre la poliomyélite, la rougeole... se font déjà grâce à notre insertion dans le vaste programme de notre zone de santé pour tous, sous l'œil vigilant du BDOM (Bureau des Œuvres Médicales de l'Archidiocèse) où travaille notre confrère médecin, Dr Damien Cassiers.
En connexion avec le Centre de Santé, le programme alphabétisation et éducation sanitaire fonctionne depuis 4 ans pour nos voisins.
En plus de l'effort d'apprendre à lire et à écrire en lingala, il y a des leçons de formation générale : l'hygiène, la physiologie humaine, le savoir-vivre, et des leçons sanitaires, la sexualité, les maladies : toux, diarrhée, fièvre...
La Solidarité agricole
Le projet est assez original. Il est unique en son genre à Kinshasa. Nous sommes dans la 5e année de son fonctionnement. Nous espérons continuer cette œuvre les années prochaines. Il est essentiellement un Centre de formation pour adultes. Les enseignements se donnent 3 jours par semaine : 3 matinées et 3 après-midi, mardi, jeudi, vendredi. La durée de la formation est de 11 mois. L'objectif est l'amélioration des petits revenus agricoles, élevages ou pisciculture... en famille ou dans la petite ferme.
Les apprenants choisissent les branches allant dans le sens de leurs intérêts. Par exemple, l'agriculture maraîchère, vivrière, l'élevage des poules, des porcs, des lapins, des canards, des dindons..., la pisciculture, l'apiculture... Le Centre a une petite ferme d'expérimentation. Maintenant le Centre est occupé à construire un petit poulailler pilote.
Le Centre assure un encadrement technique et théorique à domicile auprès des anciens apprenants. Seulement, il bute aux deux demandes suivantes : les semences et les matériels agricoles. Jusqu'à présent, nous ne savons pas répondre à ces demandes fondamentales, suite au manque de moyens adéquats. Par manque de financement, nous avons laissé en veilleuse ce projet de l'école agro-vétérinaire, qui pourrait certainement être complémentaire à Solidarité agricole.
Les autres projets
Le monastère de Mambré a des étangs dont la production est très faible, proportionnellement au temps qu'on y consacre pour l'entretien. Il y a un moulin et une charge-batterie ouverts aux voisins. Nous avons aussi un champ de manioc, qui fournit la cuisine en légumes communément appelés feuilles de manioc.
Nous sommes en train d'élaborer un projet, qui s'appelle garage-école. Cet atelier d'apprentissage s'adressera principalement aux jeunes garçons du quartier qui n'ont pas de possibilité de fréquenter les établissements scolaires classiques. Ils auront une formation professionnelle pour la vie. Ainsi, nous leur éviterons la paresse et le banditisme.
Q. N'assurez-vous pas également des services pour l'Archidiocèse ?
R. Nous avons donc notre F. Damien qui est l'un des responsables des Centres de Santé de l'Archidiocèse, qui a plus ou moins 48 Centres et dont je vous ai parlé précédemment. Le F. Blaise est curé de la paroisse Saint-Irénée, qui se situe à 900 m. du monastère.
La Coordination diocésaine des « Jeunes de la lumière » (Bilenge ya Mwinda - BYM) est assurée par F. Odon.
Un frère donne des cours dans un lycée, deux autres enseignent respectivement au Théologat des OMI (qui regroupe plusieurs congrégations), le cours de liturgie : F. François, et au Philosophat de l'archidiocèse et inter-congrégationnel, les cours de logique ancienne et moderne, épistémologie et Philosophie de la religion : F. Richard.
Enfin les moines remplissent le ministère d'accompagnement spirituel des prêtres diocésains et religieux ; des religieux et religieuses ; des agents pastoraux et des laïcs à l'hôtellerie du monastère.
Q. Quelle conclusion pouvons-nous tirer ?
R. Le contexte économique, politique... de la RDC ne permet pas d'arriver actuellement à une nette indépendance financière du monastère à partir de ses propres ressources, c'est-à-dire du travail des moines. Mais nous tendons à cela. C'est pourquoi un apport extérieur demeure nécessaire. Nous remercions tous ceux qui nous soutiennent spirituellement et matériellement. Que Dieu les bénisse. m
Propos recueillis par Sr Véronique,
osb,
Équipe Internationale AIM
Au monastère trappiste de Koutaba, Cameroun
Synthèse des réponses des frères de Koutaba au questionnaire proposé page 18 sur le travail dans nos monastères.
1. Notre travail nous
permet de subvenir à nos besoins ordinaires : nutrition, santé,
habillement, entretien sommaire de notre habitat.
2.
Nous vivons essentiellement d'une plantation de café dont la plus
grande partie de la récolte est écoulée en France
tandis que le tiers est conditionné et vendu dans le marché
local. Le service d'accueil à l'hôtellerie, la fabrication
et la vente des confitures, un petit poulailler et la production du jardin
potager apportent un appoint appréciable à l'équilibre
matériel de la communauté.
Toutes ces activités ont un impact réel sur la maturation personnelle et communautaire. Les frères développent ainsi leur sens de la responsabilité vis-à-vis de la Communauté, entrent dans la voie du dépassement et du don d'eux-mêmes. Le travail matériel favorise un bon équilibre physique et psychologique. Par son travail, le frère prend conscience d'être davantage membre à part entière de la communauté.
Le travail monastique, toutefois, ne se juge pas du point de vue de la production. Bien des services sont improductifs en eux-mêmes mais utiles à la vie de la Communauté et sont vécus en esprit de solidarité avec tous. Au monastère, on dépend les uns des autres. Les dispositions intérieures dans lesquelles nous travaillons méritent d'être soulignées : le travail monastique est vécu dans l'obéissance, en communion à Jésus et Joseph qui ont travaillé de leurs mains pour vivre.
3. Chez nous, l'horaire du travail est le même tout au long de l'année : de 8h à 11h15 et de 15h à 16h45. Mais cet horaire est ramené à 3 heures de travail pour les jeunes du noviciat à cause du temps réservé à leur formation spirituelle.
4. L'équilibre entre l'Office, la lectio, les réunions de Communauté et l'hospitalité se vit différemment selon les âges et selon les charges assumées par chacun. Cet équilibre est plus délicat et difficile à tenir pour les aînés. Mais les jeunes frères estiment que cet équilibre est satisfaisant dans notre dynamique communautaire : « L'Office nourrit la lectio, qui est à son tour stimulée par les réunions communautaires. Celles-ci engendrent davantage la charité fraternelle. Le tout favorise une bonne hospitalité : la joie dans l'accueil et la gaieté dans le service. »
5. La visée première de notre travail est de gagner notre vie pour être en mesure de mener convenablement la vie monastique, tout en nous ouvrant aux autres par le partage. La dimension de la promotion économique et sociale du milieu humain est seconde, mais non absente de notre activité économique de Communauté. Notre plantation de café fournit du travail à plusieurs familles de notre région. Ce travail sensibilise ceux qui y sont engagés à un « certain savoir-faire » susceptible de contribuer à l'amélioration de leurs conditions de vie.
6. Le travail de la
communauté réussit à couvrir environ 60 % de nos besoins.
L'aide complémentaire nous vient de notre Maison-Mère, des
monastères de l'Ordre et, bien sûr, de l'Alliance Inter-Monastères
pour les équipements ! m
Au monastère des bénédictines de Babété, Cameroun
Les bénédictines de Babété ont suivi, pour présenter leurs travaux, le même questionnaire que les trappistes de Koutaba.
1. Notre travail peut nous permettre de gagner la vie matérielle de notre monastère pour les dépenses habituelles, mais c'est très juste. Bien sûr, nous n'assumons pas les constructions et investissements, moyens de locomotion à acheter.
2. Nos travaux sont : Centre d'accueil et hôtellerie, cuisine, hosties, confitures, élevage, plantations et jardins potagers, apiculture, savonnerie, boutique. Il y en a qui sont plus rentables que d'autres.
3. L'horaire de travail
De 9h15 à 11h30 et de 15h30 à 16h45.
L'horaire de travail varie selon les travaux qu'on a à faire ou des grandes commandes, par exemple d'hosties ou de savons, ou encore selon que c'est la période de culture ou de récolte où il y a plus à faire à la plantation. Ou encore lorsqu'il y a un groupe important à l'hôtellerie et qu'il faut nourrir.
4. L'Office est toujours respecté en ce qui concerne l'ensemble de la communauté. Celle qui sert les hôtes manque rarement l'Office, sauf s'il y a un cas où elle ne peut faire autrement.
La lectio est à une heure fixe pour toute la communauté, mais en cas d'urgence on peut se rattraper à un autre moment.
En ce qui concerne l'hospitalité, nous avons régulièrement des gens qui sonnent à la porte. Ce qui fait qu'on se sent parfois obligée de quitter pour aller voir. Mais dans tous les cas on essaye de faire ensemble et de respecter les moments prévus par la communauté pour chaque chose, même s'il n'y a pas un réel équilibre.
5. Nos travaux contribuent au progrès humain et économique de nos voisins. En ce sens que lorsque nous travaillons avec eux, que ce soit à la plantation ou pour le ménage au Centre d'accueil, notre comportement, nos paroles les édifient ; par exemple, ils ne sont pas habitués à travailler en silence, mais en le faisant ils découvrent beaucoup.
Pour le progrès économique : dans le village nous avons fait l'initiation d'un projet d'eau parce qu'il n'y a pas d'eau potable. Nous avons aussi une boutique qui permet aux villageois d'épargner l'argent du taxi et de se ravitailler sur place. Nos savons, nous les vendons à un prix qui permet même aux gens qui viennent de très loin d'acheter pour aller revendre et gagner quelque chose. Pour les constructions et les autres travaux du monastère, nous embauchons pour la durée de ces travaux plus d'une dizaine d'ouvriers ; il s'agit surtout des jeunes sans emploi.
6. Notre travail ne suffit pas à faire vivre la communauté s'il y a des constructions et investissements. Les moyens que nous avons pour compléter ce qui nous manque, c'est notre Maison Mère et quelques rares dons extérieurs.
La remarque que nous avons à souligner sur la question de gagner sa vie est que :
Notre communauté a la
possibilité de multiplier ses produits, c'est-à-dire de produire
plus au point de ne pas toujours demander lorsqu'il y a quelque chose à
faire. Mais l'handicap est que nous manquons de débouchés
et d'un minimum de propagande ou publicité. Par exemple les confitures
et le savon vont très bien avec notre vie monastique, mais la vente
est très faible. Que faire ? m
À l'abbaye bénédictine
de Petrópolis, Brésil
En cherchant le maintien de la Communauté par le moyen du travail des moniales
Extrait d'une conférence
de Mère Abbesse Eugênia TEIXEIRA, osb,
à l'occasion de
la distribution des charges aux sœurs de la Communauté,
Les bénédictions qui accompagnent la distribution des charges
... Ces six bénédictions signalent tous les aspects importants des travaux pris toujours et aujourd'hui de manière organisée, bénis et confiés au Père.
1ère bénédiction - Portée par le travail, celui des fils qui prennent part à l'œuvre de création du Père, la contemplant dans les moindres choses... dans la gratuité de chaque jour.
2e bénédiction - Par notre humble travail, quel qu'il soit, nous prenons part à l'œuvre de rédemption du Fils.
3e bénédiction - Par notre humble travail, nous communions au travail de tous nos frères qui souffrent dans le monde entier, dans l'universalité établie par le Christ « à la louange de sa gloire ».
4e bénédiction - Par notre travail, aujourd'hui, lent ou rapide, nous continuons la tradition de nos pères dans la foi et dans le monachisme ; et nous sommes aussi « des serviteurs vigilants, liens d'un passé et d'un avenir toujours présents dans l'aujourd'hui de Dieu ».
5e bénédiction - Par notre travail, nous permettons que l'Esprit et l'Épouse disent « Viens », que le nombre des élus se complète et que de plus en plus s'approche la consommation de l'alliance universelle.
6e bénédiction - Par notre travail harmonieux, dans le silence, la générosité et la paix, nous anticipons le jour où il n'y aura plus plusieurs charges, où sera faite définitivement la « désignation » par le même saint « otium » de l'éternelle louange et de l'éternel amour, dans la joie sans ombre, où nous serons, toutes, saintes et sans reproche devant Lui dans l'amour, et de vivantes louanges de Sa gloire.
Le Quotidien Monastique
Opus Dei
« Ne rien préférer à l'Office divin » (RB 43, 3). Nous nous réunissons sept fois par jour pour prier : nous louons Dieu et nous intercédons pour tous les hommes. Nous méditons continuellement la Parole de Dieu dans l'Écriture Sainte. Ayant d'avance renoncé à nos biens propres, nous vivons des biens communs partagés, sans aucun superflu. Nous cherchons à être fidèles à l'enseignement des Apôtres du Christ, transmis par les pasteurs (Magistère) de l'Église. Nous travaillons sérieusement pour notre entretien et pour aider les plus pauvres. Nous vivons en communauté présidée par une Abbesse à laquelle nous obéissons et nous sommes coresponsables pour la marche de la communauté.
Hospitalité
« Que tous les hôtes arrivés au monastère soient reçus comme le Christ » (RB 53, 1). C'est l'accueil chrétien, fraternel à quiconque s'approche de notre monastère, non seulement pour prier mais pour trouver amitié, conseil, réconfort ; toutes ces choses dont la créature humaine a besoin dans son chemin. C'est l'accueil à tous ceux qui cherchent lumière et paix là où ils doivent trouver l'amour vrai et désintéressé.
Ateliers
1. hosties, 2. fabrication de pain, 3. bricelets (biscuits d'origine suisse), 4. étoles, 5. artisanat : poupées, bougies, chapelets, images, cartes, etc., 6. peinture d'icônes et d'autres tableaux, 7. computation : digitation, scanning, édition, 8. Xerox en blanc et en couleur, reliure, cartes, 9. traductions : anglais, français, italien, espagnol.
La moniale, soumise à la loi du travail, comme tout chrétien doit le prendre comme un prolongement de l'œuvre du Créateur, une contribution personnelle à la réalisation du plan de la Providence, un moyen de développement de ses facultés humaines et une occasion de partage avec les plus nécessiteux. C'est ainsi que le travail devient une œuvre d'ascèse rédemptrice et un moyen normal de subsistance.
Les différentes formes de travail monastique s'adaptent, dans notre monastère, à la capacité et à l'aptitude de chaque sœur.
Dans les différents ateliers que nous avons pour l'entretien de la communauté, nous travaillons naturellement avec une moniale responsable et des auxiliaires qui sont, la plupart, des sœurs du Noviciat.
Malgré le grand effort, le produit correspond à 10% de la recette mensuelle. Le travail des sœurs ne couvre pas les dépenses du monastère. Il y a une très grande interrogation. Quoi faire pour que nous puissions réellement nous suffire par le moyen du travail monastique ?
Le travail le plus lourd de la maison est celui de la cuisine. Il est fait par douze sœurs qui s'en occupent, chacune à son tour.
Nos revenus ne suffisent pas pour avoir des employés. Ce sont les sœurs qui s'occupent de tout l'entretien du monastère. m
Au monastère bénédictin de Gravata, Brésil
Extraits d'un article du
F. Bernardo, osb,
paru dans le Bulletin
de l'abbaye Notre-Dame de Tournay, France
Présentation du monastère
Le Mosteiro da Escuta do
Senhor a été fondé par le F. Cristiano, profès
solennel de Goias. Se sentant appelé par le Seigneur à vivre
en ermite, le F. Cristiano, peu après ses vœux solennels, a demandé
à se retirer dans une petite propriété appartenant
à sa famille, dans le Nordeste du Brésil, à 80 kilomètres
de la ville de Recife, capitale de l'État de Pernambouc.
Là, il a vécu
en solitaire pendant de nombreux mois. Mais, comme pour les moines de l'antiquité
monastique, très vite des jeunes et des moins jeunes sont venus
se mettre à l'école de la prière. Certains ont demandé
à rester. Le F. Marcelo Barros, Prieur de Goias, est venu visiter
le F. Cristiano. (...) Il a suggéré au F. Cristiano de s'entendre
avec Don Costa, l'évêque de Caruaru, sous la juridiction duquel
est situé le lieu d'implantation de ce centre de prière,
le seul du diocèse, afin de voir s'il accepterait la fondation d'un
monastère bénédictin de droit diocésain. Heureux
de cette initiative, Don Costa a accepté de grand cœur cette expérience,
avant de l'officialiser en 1996 et d'autoriser le F. Cristiano à
recevoir des jeunes pour mener la vie monastique sous la Règle de
saint Benoît.
La vie de prière
Comme tout monastère bénédictin, nous avons les offices habituels, suivant le cursus de la Règle de saint Benoît, aménagé pour les Matines. Notre liturgie, en langue portugaise, est toute simple, classique, digne ; n'ayant pas de chantre formé et compétent, nous récitons beaucoup de psaumes recto-tono. Nous essayons d'y mettre toute la dignité possible, toute la révérence due au Seigneur.
Levés à 4 heures et quart du matin, nous commençons la journée par les Matines de 4h30 à 5h30. Temps de lectio avant le petit déjeuner à 6 heures, suivi d'un temps de prière personnelle. Après les Laudes, récitées à 6h45, nous nous réunissons au chapitre : lecture et commentaire de la Règle, distribution du travail, organisation de la journée. Nouveau temps de lectio avant Tierce à 9 heures. Puis travail jusqu'à 11h45. Un quart d'heure de prière communautaire à la chapelle, puis Sexte à midi. Repas, temps libre jusqu'à deux heures. De 14 à 15 heures, travail ; None à 15 heures, puis travail de nouveau.
On peut penser que le travail ainsi fractionné par la prière de None n'est pas très efficace ! Le temps d'arrêter, le temps de reprendre ! C'est vrai, mais ce geste veut montrer le primat de la prière sur le travail, l'équilibre dans la vie monastique entre prière et travail ; le travail étant imbriqué dans la prière, on peut l'interrompre pour rencontrer le Seigneur de manière plus profonde, même si le moine s'efforce de prier pendant son travail. La rencontre avec le Seigneur nous donne la force de travailler. L'essentiel pour le moine, ce n'est pas le travail, c'est la prière.
À 16h30, fin du travail. À 16h45, prière silencieuse pour les frères, avant l'Eucharistie et les Vêpres à 17 heures. Comme il n'y a pas de prêtre parmi nous, c'est le prêtre de la paroisse voisine qui célèbre : nous sommes un peu tributaires de son horaire, car il a plusieurs lieux de culte et bien des fidèles à s'occuper. Les dimanches et jours de fête, il ne peut venir célébrer chez nous que le matin à 8 heures. Par contre, le mardi, il ne vient pas, c'est son jour de repos : nous n'avons pas alors d'Eucharistie. Un quart d'heure après la fin de l'Eucharistie, repas. Moment libre avant une petite réunion informelle entre nous, une sorte de récréation, suivie des Complies vers 20h30. (...)
Le travail
La communauté se charge de tous les services : cuisine, balayage, entretien, etc.
Pour notre subsistance, nous avons un atelier de vêtements liturgiques. F. Cristiano est un artiste reconnu au Brésil ; il a vécu de son art, il a même vendu des tapisseries en Suisse et en Allemagne. Lors de ses pérégrinations en Europe pour organiser des expositions, il a séjourné au monastère de Tournay : pour remercier la communauté, il a offert une chasuble blanche et un certain nombre d'étoles. C'est lui qui est le maître d'œuvre de cet atelier, atelier connu qui reçoit bon nombre de commandes : aubes, chasubles, étoles, etc. Il accepte aussi de restaurer des objets liturgiques en mauvais état, certes des chasubles ou des chapes, mais aussi des statues, des croix. Pour faire face à l'abondance des demandes, nous avons dû embaucher une voisine. En lien avec cet atelier, nous confectionnons aussi quelques icônes, des icônes en papier que nous collons sur des morceaux de bois : elle sont vendues uniquement à la porterie du monastère.
Autre atelier, une ciergerie artisanale. Nous confectionnons toutes sortes de bougies pour le culte, comme pour les fêtes. En ce moment, les frères sont loin d'être inactifs : ils ont une commande de quelques centaines de cierges pour la célébration pascale. Ils espèrent pouvoir honorer à temps cette importante commande. Dès le mois d'avril, nous commençons à préparer les cierges pascals pour l'année suivante, car le F. Cristiano les décore tous de façon à les personnaliser.
Enfin un atelier de boulangerie-pâtisserie fonctionne les vendredis et samedis. Tout ce que nous confectionnons, pains, biscuits et gâteaux, est vendu durant le week-end, surtout à la sortie de l'Eucharistie dominicale où notre église est remplie de personnes de Gravata, de Caruaru, et même de Recife.
Notre propriété n'est pas bien grande, mais elle comporte quelques arbres fruitiers. Les fruits servent à notre consommation personnelle ; la récolte n'est pas assez importante pour en commercialiser.
Nos revenus proviennent de notre travail dans les ateliers